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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Pause-réconfort

En guise de baume sur nos plaies vives, ces quelques vers d’Anthony Phelps, ce géant de la littérature haïtienne, tirés de son poème-étendard, «Mon pays que voici».

Qui ose rire dans le noir ?
Nous n’avons plus de bouche pour parler
Quel choeur obscène chante dans l’ombre
cette chanson dans mon sommeil
cette chanson des grands marrons
marquant le rythme au ras des lèvres
Qui ose rire dans le noir ?

Nous n’avons plus de bouche pour parler
Les mots usuels sont arrondis
collants du miel de la résignation
et la parole feutrée de peur
s’enroule dans nos cerveaux capitonnés
Qui ose rire dans le noir ?

Nous n’avons plus de bouche pour parler
nous portons les malheurs du monde
et les oiseaux ont fui notre odeur de cadavre
Le jour n’a plus sa transparence et ressemble à la nuit
Tous les fruits ont coulé nous les avons montrés du doigt
Qui ose rire dans le noir ?

Nous n’avons plus de bouche pour parler
car le clavier des maîtres mots des Pères de la Patrie
au grenier du passé se désaccorde abandonné

Ô mon Pays si triste est la saison
qu’il est venu le temps de se parler par signe

January 16th, 2010
Catégorie: Lectures Catégorie: Aucune

7 commentaires à propos de “Pause-réconfort”

  1. Alain Decarie a écrit:

    Je viens tout juste de découvrir votre site par le biais du billet sur martineau (ne mérite pas la majuscule) et je veux simplement vous remercier de me faire connaitre Anthony Phelps; pour un ignorant de la littérature haïtienne. c’est un bon début pour mes nouvelles recherches. Merci bien.

  2. Gerald R a écrit:

    Si juste, rien de plus à dire. Merci, Stan.

  3. Kendra a écrit:

    Merci de ce beau texte. Puis-je demander à vos lecteurs de l’aide avec une traduction en anglais pour que je puisse le partager avec mes éléves? (Surtout le passage “…car le clavier des maîtres mots des Pères de la Patrie / au grenier du passé se désaccorde abandonné” qui me pose problème.)

    Merci d’avance

  4. Stanley Péan a écrit:

    Une proposition, comme ça: «for our homeland’s founding fathers’ keyboard of magic words / up in the attic of the past is now out of tune, abandoned»…

  5. Kendra a écrit:

    Merci bien!

  6. Kendra a écrit:

    Je me permets de vous demander une correction de ma première tentative de traduction. Ce n’est qu’une pauvre ébauche, et j’apprécierai énormément vos commentaires. (Dans le cadre des efforts de notre lycée de montrer de la solidarité avec Haïti, mes élèves de français vont lire le texte en français et en anglais devant l’école la semaine prochaine, dont la raison pour laquelle je fais cette tentative de traduction.) Merci d’avance.

    Who dares laugh in the darkness ?
    We no longer have a mouth to speak with
    What obscene choir sings in the shadows
    This song in my slumber
    This song of great chestnuts
    Marking the rhythm on the edge of my lips
    Who dares laugh in the darkness ?

    We no longer have a mouth to speak with
    The usual words are rounded off
    Dripping with the honey of resignation
    And the words, velvety with fear
    Roll around in our padded brains
    Who dares laugh in the darkness ?

    We no longer have a mouth to speak with
    We carry the misery of the world
    And the birds have fled our cadaverous odor
    The day has lost its clarity and resembles night
    All the fruits have fallen away, we pointed at them
    Who dares laugh in the darkness ?

    We no longer have a mouth to speak with
    For our Homeland’s Founding Fathers’ keyboard of magic words
    Up in the attic of the past is now out of tune, abandoned

    Oh my country, so sad is the season
    That the time has come to speak in signs

  7. Stanley Péan a écrit:

    Bonjour Kendra,

    Je vous ai envoyé mes quelques corrections/suggestions directement par courriel.

    SP

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