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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Québec 2012 : Le financement du CALQ doit figurer dans les priorités du prochain gouvernement

De tous les enjeux en culture au Québec, le plus criant est le financement du cœur créatif. Au moment où les partis politiques prennent leurs engagements en vue du prochain mandat, il est crucial que ce rendez-vous des artistes et travailleurs culturels avec le futur gouvernement du Québec ne soit pas manqué, car il en va de la vitalité culturelle du Québec à moyen et à long terme.

La fragilité du cœur créatif demeure une réalité incontestable. La Chambre de commerce du Montréal métropolitain en a fait un de ses principaux constats en 2009 dans une imposante étude sur le financement de la culture. Citons-la : « Si notre secteur culturel est économiquement vibrant, le « coeur créatif » demeure fragile. (…) Les artistes sont les travailleurs les plus précaires du secteur culturel ». Ajoutons qu’en cette matière, ce qui vaut pour Montréal vaut pour tout le Québec, sinon plus.

Or, renforcer le cœur créatif passe, en tout premier lieu, par le redressement du budget du Conseil des arts et des lettres du Québec. Quels engagements financiers les différents partis en lice prendront-ils à l’endroit du CALQ ? Céderont-ils tous à la courte vue de l’électoralisme, ou montreront-ils plus de vision face à l’avenir de la création au Québec. Les arts à l’école et dans les loisirs ou l’exportation sont des projets importants, mais est-ce là toute la vision des partis en matière de culture ? On s’attend à plus, surtout face au problème du cœur créatif que personne ne conteste et qui perdure depuis si longtemps.

Chiffrons les choses. Une analyse récente des données du CALQ, effectuée par le Mouvement pour les arts et les lettres, fait état d’un manque à combler de 35,5 millions de dollars à son budget pour pouvoir offrir aux artistes et aux compagnies artistiques un soutien comparable à celui d’il y a dix ans. Cette évaluation ne tient compte que de l’inflation et des taux de réponse aux demandes qui, par ailleurs, n’ont cessé d’augmenter durant la même période; elle n’inclut pas les nouveaux besoins créés par l’arrivée du numérique et les défis  de positionnement de la culture québécoise dans cet univers, non plus que les manques à gagner découlant des coupes fédérales de 2008 et de 2012 dans les programmes de Patrimoine Canada et au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

Dans un contexte de mondialisation, de virage numérique sans précédent, et compte tenu des positions du gouvernement Harper sur le front des arts et de la culture, les défis posés aux artistes et aux travailleurs culturels du Québec sont majeurs. S’agissant du rayonnement international, il ne saurait aller de soi en dehors des activités et des efforts investis par les artistes et les travailleurs culturels pour que les œuvres existent et atteignent leurs cibles. Pour accroître le rayonnement international, et qui plus est, pour gagner de nouveaux marchés, Il faut impérativement réinvestir dans le cœur créatif, le maillon faible de notre secteur culturel.

Enfin, si le financement du CALQ vient en tête de liste, plusieurs autres enjeux préoccupent les artistes et les électeurs sensibles à la question culturelle, certains pesant lourd sur le futur. Les partis se prononceront-ils sur ces sujets ? Que proposent-ils pour faciliter l’accès aux études supérieures dans le contexte de l’économie créative ? Quelle est leur position sur la protection de la diversité culturelle dans les accords de libre-échange, notamment entre le Canada et l’Europe ? Qu’en est-il de leur position en matière de droits d’auteur, à l’ère du numérique et après l’adoption de la Loi 32 par le gouvernement Harper ? Quelles sont leurs stratégies face aux coupes, politiques et retraits du gouvernement fédéral ? Ces derniers sujets, qui touchent beaucoup aux relations fédérales-provinciales, ont été et demeurent des objets de préoccupation majeurs au sein de nos milieux culturels. Un éclairage des partis sur ces questions serait le bienvenu.

 

Stanley Péan, écrivain
Porte-parole du Mouvement pour les arts et les lettres