stanleypean.com


Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Éloge du pèlerinage

Sergio Kokis, vous avez oeuvré à l’hôpital Sainte-Justine comme psychologue auprès des enfants en très bas âge. Avez vous l’impression que cette expertise vous sert comme romancier?
— Mais non, mais non, pas du tout. La littérature me sert plutôt à échapper à la psychologie. Parce que la psychologie, la psychiatrie, la psychanalyse, tout ça relève uniquement des fantasmes de bourgeois viennois du XIXe siècle!

Le souvenir de ma toute première entrevue avec l’auteur du Pavillon des miroirs est encore très présent dans ma mémoire. Cela se passait au printemps 1995, au Café littéraire du Salon du livre de Québec, du temps de l’administration de mon ami (et partenaire d’affaires au LibraireDenis LeBrun. Kokis venait tout juste de commencer à rafler une ribambelle de prestigieuses distinctions littéraires pour son premier roman. Et moi qui ignorait tout de son goût pour la provocation, j’apprenais à connaître le personnage caractérisé par un humour pince-sans-rire et un refus de se plier aux diktats de la rectitude politique. Depuis, j’ai eu l’occasion de l’interviewer à plusieurs reprises pour la télé, la radio, le journal ou devant public dans des salons du livre, j’ai eu le plaisir de le côtoyer dans des manifestations littéraires un peu partout sur la planète, de trinquer avec lui et de développer avec lui un rapport basé sur la sympathie et l’admiration. J’ai aussi lu et commenté la plupart des livres qu’il a fait paraître au fil des quinze dernières années, ce qui fait de moi une sorte d’exégète de son oeuvre. Voilà pourquoi je n’ai pas hésité une seule seconde quand mes patrons de Radio-Canada m’ont demandé de remplacer à pied levé mon collègue François Dompierre qui devait s’entretenir avec Kokis jeudi dernier dans le cadre d’une causerie présentée à la dixième édition du Festival littéraire Metropolis Bleu.

Quoique non avisé du changement d’animateur, Sergio était néanmoins heureux de me retrouver pour cet entretien portant sur la marche à pied et le pèlerinage, entretien que j’avais préparé avec zèle mais pour lequel je n’ai guère eu besoin de toutes ces notes que j’avais traînées en guise de filet de sûreté. Il avait fallu que je pose une ou deux questions sur les liens entre l’errance (qui est au coeur de l’oeuvre de Kokis) et le pèlerinage (par exemple, celui vers Saint-Jacques-de-Compostelle que le peintre-romancier et sa femme ont réalisé à plusieurs reprises et qui a inspiré à Kokis des passages de son roman Le fou de Bosch)… et il n’en fallait pas plus pour amorcer une conversation conviviale avec cet esprit brillant et ce conteur de tout premier ordre. Volontiers volubile, Sergio Kokis n’est jamais à court d’anecdotes et de traits d’esprit; mais l’autre jeudi, étonnament, je l’ai trouvé plus émouvant que jamais, lui qui ne donne pas si aisément dans l’émotion, en particulier quand il parlait de son défunt père.

L’activité d’animation s’est bien évidemment terminée au bar de l’hôtel Delta centre-ville, où Michel Vézina puis Dominique Bergeron n’ont pas tardé à nous rejoindre. Et accoudé au zinc, Kokis m’a confié les grandes lignes de son prochain roman, le roman noir que je l’encourage à écrire depuis des années. Est-il besoin de vous dire que ça promet?

Pour ceux et celles que ce genre de choses peut intéresser, voici quelques papiers que j’ai signés dans les pages du Libraire à propos de l’oeuvre romanesque de Kokis au fil des ans: «Étrangers en terre étrangère», «Le monde, dans sa mystique opacité», «Errances», «Sergio Kokis: l’amour du lointain», «Explorer le réel et l’imaginaire», «Les lumières de la rampe», «Sergio Kokis: l’inaccessible Eldorado».

May 5th, 2008
Catégorie: Commentaires, Lectures, Nouvelles, Réflexions Catégorie: Aucune

2 commentaires à propos de “Éloge du pèlerinage”

  1. mblooms a écrit:

    la psychologie et la psychiatrie pour les bourgeois ? vous savez il y a des gens qui ont la partie de la vie moins facile que vous :
    http://www.agidd.org/cont_chimiques.htm

    c ‘est beau quand les prejugés s ‘affichent aussi ouvertement !

    une gang de “bourgeois”

  2. Stanley Péan a écrit:

    M. Blooms,

    Vous semblez m’avoir mal lu; je n’affirme pas que la psychologie et la psychiatrie soient réservés aux bourgeois. Je rapportais seulement la boutade de Sergio Kokis qui, en dépit de son discours critique à l’égard de ces disciplines, a néanmoins gagné sa vie pendant une trentaine d’années comme psychologue d’abord en Gaspésie puis à l’hôpital Sainte-Justine.

    Histoire de faire amende honorable, je vais poster l’hyperlien de l’AGIDD sur la page d’accueil de mon blogue. Mais de grâce, ne me faites pas dire des choses que je n’ai pas dites.

≡ Soumettez votre commentaire