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Souvenirs de Paul M. Marchand, romancier

En surfant dans l’Internet à la recherche d’autres renseignements sur Paul, en prévision de cette entrevue qu’il me fallait accorder à RDI, je suis tombé sur ce billet griffonné en 2003 à propos de son avant-dernier roman (auquel j’avais attribué quatre étoiles sur cinq) et de son rapport à la faune médiatique québécoise, dans la section «Littérature» du défunt guide culturel de Radio-Canada.ca. (Étonnant que tout ce matériel soit encore en ligne, un peu comme dans les limbes du cyberespace, puisque plus aucun hyperlien ne nous y conduit depuis la page d’accueil du site.)

 Je me permets de reprendre ce qui m’appartient pour mieux vous l’offrir ici…

LE RETOUR DE L’ENFANT TERRIBLE

stanleypean-logoSRC     Quatre étoiles sur cinq

Paul M. Marchand, le controversé reporter de guerre devenu romancier ET «persona non grata» des médias québécois, vient de faire paraître une magistrale deuxième oeuvre de fiction. Et combien on parie que notre presse littéraire la passera sous silence? Dommage, mais prévisible…

 L’homme au cigare
On a la couenne bien sensible, dans le merveilleux monde du journalisme d’ici. Pas étonnant alors que Marchand, authentique franc-tireur et ennemi juré du bon-ententisme, de la complaisance et de la médiocrité, ait réussi à se mettre à peu près tout le monde à dos en l’espace des deux ans où il a habité Montréal. Reparti en Europe, l’homme au cigare ne s’en porte pas plus mal, j’imagine, même si son oeuvre romanesque qui s’affine d’un livre à l’autre doit souffrir de la susceptibilité à fleur de peau de nos scribes.

 L’envers de l’autofiction
Après les deux tomes de Sympathie pour le Diable qui relataient ses années en terres inhospitalières, Marchand nous a offert un premier roman flamboyant, inspiré de ses expériences de reporter de guerre, Ceux qui vont mourir. Tournant le dos à toute tentation autobiographique, Marchand s’est investi cette fois dans le récit que lui a livré une lectrice, qui a vécu une passion déchirante et interdite… avec son propre père !

 Inceste: ce mot qui salissait notre amour
Qu’on ne se laisse cependant pas tromper par le sujet, en apparence scabreux. Marchand n’a manifestement pas la moindre envie de faire quelque concession que ce soit à la mode de l’impudeur qui sévit dans l’Hexagone. Au-delà de l’anecdote, c’est l’écriture nerveuse et pyrotechnique par moments, plus réservée par d’autres, qui fait la force de ce roman d’amour, au titre emprunté à Brel.

Malgré les qualités indéniables de ce livre, combien on parie que personne de toute faune journalistique ne daignera y jeter un coup d’oeil? Dommage, mais combien prévisible…

 

J’abandonne aux chiens l’exploit de nous juger,
Paul M. Marchand, Grasset.

 

 

June 24th, 2009
Catégorie: Commentaires, Lectures Catégorie: Aucune

8 commentaires à propos de “Souvenirs de Paul M. Marchand, romancier”

  1. PERRIERE a écrit:

    Il pleut ici à Annecy depuis que la nouvelle de la mort de Paul est tombée froidement à une heure avancée de la nuit… Vingt ans que nous nous connaissions! J’ai vécu toutes ses guerres… Je l’ai gardé une semaine dans mes bras, tremblant, après l’enlèvement de Roger Auch… Il était si beau aussi, dans «les coulisses»… C’est mon pote de toujours et, ce soir, je suis le vide… Paul, s’il te plaît, fais-moi rire encore.

    Sylviane

  2. Laval Pineault a écrit:

    Merci pour ce texte sur Paul Marchand, il offrira certainement un peu de baume pour la peine qu’éprouvent présentement mon fils et ma petite fille qui l’ont très bien connu et aimé. (Cela fait une différence avec les commentaires de M. Roger Auch.)

  3. arsenault a écrit:

    Je suis sciée d’apprendre que c’est un suicide. Je ne pourrai dire ici ce que j’ai saisi de ce mec en quelques lignes, impossible. Mais de un: sa méprise envers madame Bombardier lui a valu je crois d’être exclu des salons du livre. J’ai vu un peu plus que ca. En fait, j’ai été témoin de tout cela dans un salon du livre, par hasard. Bref, un phénomène qui flottait je ne sais pas à quel niveau mais qui s’EMMERDAIT dans les salons du livre. Qui disait: «J’aimerais mieux être à Londres ou à Paris, n’importe où plutôt qu’à Trois-Rivières…

    — Ah bon… Dommage, mais là on est à Trois-Rivières.»

    Vous demanderez aussi les commentaires à Michel Brulé. Je veux dire que j’ai lu ses deux premiers livres et que c’est formidable. C’est très bien écrit. Comme il disait: «mais c’est vrai.»

    Line

  4. anne campagna a écrit:

    Je comprends tout à fait votre sentiment relativement à la mort de Paul Marchand. Je le visitais occasionnellement lorsqu’il restait sur la rue St-Paul. Je n’ai jamais trop compris la façon qu’il avait de s’intéresser à moi («Alors, vous allez les vouloir comment vos oeufs demain matin? — Euh… Quoi?» je n’avais su que répondre, abasourdie par son front!) et d’ensuite m’insulter. Peut-être était-ce sa façon d’aborder le sexe opposé? Je suis partie en Bosnie pour un reportage et ensuite, mon boyfriend, un photographe qui l’avait photographié sur la couverture de son livre, m’avait dit si je ne me souviens bien qu’il aurait voulu que je lui parle de la Bosnie, mais j’étais passée à autre chose, je voulais avancer, Paul. Je me disais que je n’avais plus le temps d’écouter ses insultes ou ses réflexions, bref je me tanne vite alors que j’aurais dû… J’aurais dû aller le voir… Il est trop tard. Puis l’annonce de sa mort m’a complètement bouleversée depuis une semaine que je suis en état de choc. On aurait du l’aider, je crois que beaucoup de gens auraient donné leur chemise pour Paul… Pourquoi n’est-il pas revenu a Montréal ou tant de gens l’aimaient? On ne le saura jamais et il est trop tard. Il était irremplacable.

    Anne Campagna

  5. Yvan Genest a écrit:

    Je l’ai connu dans le Vieux Montréal où il me visita a quelques reprises dans mon atelier. Un peu plus tard, il retourna en France et j’écrivis ce court texte en pensant à lui.

    Chair de vivant ou de mort, il en bouffait comme un ogre entre deux voluptueuses bouffées d’un gros cigare pendu comme un revolver à la ceinture de ses dents. Il était si long, dans ce corps emprunté pour le temps d’une escapade dans la vie, qu’il se déployait dans l’instant comme un héron qui décolle.

    Il avançait soulevé par le vent d’une formidable volonté, ses épaules tendues vers les plus lointains rivages imaginés et tandis que ses jambes pagayaient dans le ciment comme d’interminables rames, les pans de sa chemise battant comme des voiles inutiles, il naviguait plus qu’il ne marchait, sur les trottoirs de sa vie, dont il surveillait toutes les issues possibles, jour et nuit.

    Nous échangeâmes presque rien; quelques promenades et des cafés noirs comme la nuit, avec nos âmes habillées de longues capes de silence.

  6. Suzanne a écrit:

    Stanley,

    I loved your song. I needed to retreat from this pain for a while so I didn’t write back but I hope we can speak again soon. Thank you for your kind words and help even if we are in different cities. I have a small piece of Paul that I would like to share:

    I dated Paul seriously in 1997 – 1998. I remember his 35th birthday in Montreal. I gave him his favorite perfume, “Égoïste” by Chanel. This moment is something that i will always remember him by: such a strong, intelligent and stoic man but when he opened the gift he shed a few big fat tears that fell heavily on the wrapping paper. I have never seen him cry before or since…

    Goodbye Paul. I loved you so much.

    Suzanne (Bou Bou Girl)

  7. Valie a écrit:

    J’ai connu Paul de 1997 à 2003, je lui avais donné le surnon de boubou qu’il a ensuite modifié ! Un homme surprennant, difficile à comprendre à certain moment, mais je n’oublierai jamais car lui ne l’a jamais fait…

  8. Serge Mouraret a écrit:

    Sur le capot de sa voiture, à Sarajevo, pendant le siège, il avait écrit en grosses lettres “Morituri te salutant”? Tout un programme déjà. Respect, Paul.

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