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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Haïti 2014, jour 6: Briser la glace

Il faut littéralement traverser la ville pour arriver au Collège de Côte Plage, sis à l’angle des rues Tova et Côte Plage 19 dans la commune de Carrefour. Heureusement, le 18 novembre, pour commémorer la bataille de Vertières, c’est jour férié, alors la circulation est plus fluide que je l’aie jamais vue dans la capitale haïtienne. Malgré la journée de congé, l’école est ouverte pour la tenue de diverses activités parascolaires, dont l’atelier d’écriture narrative que j’anime et une vidéoconférence avec un illustre diplômé de l’institution résident désormais en France.

M. Marc Anthony Alix, le directeur, accueille avec fierté la délégation formée de Colette Armenta-Pérodin, de Katel et de moi, et pour cause : bien qu’il ait été gravement endommagé par le séisme il y a quatre ans, le Collège s’enorgueillit de sa vocation résolument progressiste. En partenariat avec la FOKAL et la fondation de Qatar, l’établissement a entrepris l’an dernier un ambitieux projet d’implémentation du système multimédia et d’électrification des écoles situées dans les sections rurales de l’île dépourvues de ressources matérielles, financières et humaines. Ainsi, Côte Plage est devenu le cœur de REPTICE, le Réseau des écoles du programme technologie de l’information, de la communication et de. Deux des élèves du Collège sont d’ailleurs allés au Japon pour part à un colloque sur le développement durable et partager leur expérience à Côte Plage.

Cote Plage 1     Cote Plage 2     Cote Plage 3

Je travaille ce matin avec une vingtaine d’élèves âgés de dix à quatorze ans, issus de Côte Plage et d’établissements voisins : Notre Dame des Petits, Apôtre Paul et Eddie-Pascal. Ils et elles ont choisi d’être là, alors la question de la motivation ne se pose même pas. Je leur lis un conte de Bouki et Malice, le décortique avec eux pour identifier les composantes du texte narratif. Puis je les invite à écrire, d’abord sur eux-mêmes, ensuite sur leurs voisins et voisines dans le local. Ils et elles se prêtent aux exercices que je leur propose de bonne grâce mais avec une certaine timidité. Ceux et celles que j’invite à lire leur création à voix haute ne manquent pas de le souligner, plus particulièrement ce garçon frondeur qui souligne à grands traits la beauté de sa condisciple et déplore qu’elle ait refusé de lui donner son numéro de téléphone…

Nous terminons notre période d’écriture avec un exercice consistant à narrer dans leurs mots, du point de vue de leur choix, la capitulation du général Rochambeau à Vertières le 18 novembre 1803. Les élèves connaissent déjà les détails épiques de cette bataille décisive pour l’indépendance haïtienne (notamment le courage et l’entêtement légendaires de l’intrépide François Capois, dit « Capois-la-Mort », que même son adversaire français prit la peine de saluer); alors ils et elles sont à même d’en résumer les moments forts. Une équipe de trois adolescentes me surprendra agréablement par l’audacieux choix de reconstituer cette journée historique à travers le regard de l’épouse du général Jean-Jacques Dessalines, grand vainqueur à Vertières et père de la nation haïtienne. Par la suite, je prendrai quelques minutes pour répondre à leurs questions sur mon travail d’écrivain et la mission de Clowns Sans Frontières.

Attablés dans le bureau M. Alix autour de collation légère qu’il a fait préparer pour nous (arbre véritable frit à la manière des bannann peze et jus de pommes), nous bavardons de la situation des écoles communales, de la nécessité de faire toujours plus avec les modestes moyens à la disposition des établissements afin d’assurer aux élèves, au-delà de leur seule réussite académique, la possibilité de s’inscrire dans la marche d’une société en construction.

Voilà en gros comment j’ai enfin brisé la glace avec ces jeunes des écoles communales de Port-au-Prince que je me suis engagé à rencontrer au fil de cette tournée. Je passe ensuite le reste de l’après-midi à faire avancer divers dossiers en attendant l’heure de mon rendez-vous avec Joël Widmaier et sa compagne Miléna Sandler, qui président conjointement aux destinées du Festival international de jazz de Port-au-Prince, rencontre dont il sera question sur mon autre blogue accessible via le po

November 19th, 2014
Catégorie: Commentaires, Événements, Réflexions Catégorie: Aucune

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