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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Sur le trottoir (encore une fois)

Si je me fie aux conversations que j’ai eues depuis la diffusion de l’émission Tout le monde en parle d’hier, je ne suis pas le seul avoir été médusé par les réflexes passifs-agressifs et la malhonnêteté intellectuelle de Richard Martineau, invité sur le plateau de Guy A. Lepage pour parler de sa position dans le conflit qui oppose la direction du Journal de Montréal à ses employés en lock-out depuis le 24 janvier dernier. Je ne vous ferai pas ici le résumé détaillé de ses échanges avec Raynald Leblanc, représentant le syndicat des employés, mais si vous avez manqué l’émission, lisez ce compte-rendu de Caroline Roy sur le site Rue Frontenac. Que Martineau brandisse son insatiable soif de liberté et son individualisme forcené comme des blasons, qu’il refuse autant la sécurité d’emploi que l’appartenance à un syndicat, c’est son droit tout à fait légitime. Mais qu’il feigne de ne pas comprendre qu’un lock-out (tout légal soit-il) n’est pas l’équivalent d’une grève, que ce moyen de «négocier» (tout légal soit-il) démontre surtout que la partie patronale détient le gros bout du bâton, voilà qui relève soit de l’ignorance crasse, soit de la mauvaise foi tout aussi crasse. Et quand il s’indigne de découvrir que Leblanc et sans doute bien des employés du Journal ne lisent pas ses chiures, pardon, ses humeurs — au grand amusement de Dany Turcotte, par moments génial de sarcasme –, il bascule dans le grotesque pur et simple.

Cela dit, je n’insisterai pas sur ses mensonges éhontés (au Journal, on n’a jamais parlé des dépenses de la direction de Radio-Canada ailleurs que dans la page «Vos impôts» — mon oeil, oui!), ni sur son impolitesse coutumière, ni sur ses raccourcis et ses syllogismes, ni sur sa propension au mélodrame (la fille de Denis Lévesque a des amies haïtiennes et vous osez sous prétexte d’humour laisser croire qu’il est raciste), ni même sur ses pathétiques critiques de la bande annonce de Polytechnique qui renvoient uniquement à son narcissisme primaire (j’étais allé au cinéma pour rigoler en compagnie de ma blonde cet après-midi-là, pas pour me faire agresser par des images en noir et blanc de ce drame). Je n’insisterai sur rien de tout cela mais me bornerai à remarquer qu’avec le temps, ces manies qu’il a de piquer des crises d’hystérie sur les plateaux de télé et de se draper dans la chasuble du moraliste de droite, incorruptible et incapable de la moindre modestie, du moindre doute le font ressembler de plus en plus à une sorte de clone masculin de Denise Bombardier. Je ne rappellerai même pas qu’à en croire cet indomptable «franc-tireur», il suffit de hurler des insanités à propos de Jean Charest en gros plan dans une caméra pour prouver, par a+b, que la liberté de presse est totale et absolue au Québec.

À la place, en réponse à son refus catégorique de reconnaître les risques de la convergence grandissante dans l’Empire Quebecor et leurs répercussions sur la qualité de l’information offerte au public, je me bornerai à citer de nouveau un extrait d’une chronique historique:

[L]orsqu’un animateur-vedette du réseau TVA (empire Quebecor) divorce, vous pouvez être sûrs que les journaux à potins de l’empire Quebecor n’en parleront pas, histoire de protéger sa réputation. Lorsque le président de l’empire Quebecor sent le besoin de refaire son image, il se retrouve en page couverture d’un magazine appartenant à l’empire Quebecor, un sourire large comme ça dans la face et son petit bébé dans les bras. Si vous voulez voter pour les finissants d’un concours diffusé sur les ondes du réseau TVA (empire Quebecor), vous n’avez qu’à remplir le coupon-réponse inclus dans un magazine appartenant à l’empire Quebecor. Les magazines appartenant à l’empire Quebecor sont toujours les premiers à sortir les scoops impliquant les vedettes des émissions de télé diffusées sur le réseau TVA (empire Quebecor). Chaque jour, dans Le Journal de Montréal (empire Quebecor), vous pouvez lire une chronique sur Star Académie, une émission diffusée sur les ondes du réseau TVA (empire Quebecor). Savez-vous sur quel réseau de télé les finissants de Star Académie feront leurs débuts professionnels, une fois l’émission terminée? Vous avez visé juste: sur le réseau TVA (empire Quebecor). Et on pourra voir leur jolie bette en page couverture des journaux et des magazines appartenant à l’empire Quebecor. Ils seront aussi interviewés dans les talk-shows diffusés sur les ondes du réseau TVA (empire Quebecor). Talk-shows qui seront mis en vedette dans les pages des journaux appartenant à l’empire Quebecor. Car dans l’empire Quebecor, tout converge, tout aboutit au même résultat, tout tend vers un but commun. L’empire Quebecor est comme un cochon. Rien ne se perd, tout se mange, on fait du gras avec la viande, de la sauce avec du gras, de l’eau avec de la sauce, tout est bon, tout peut servir, tout se recycle, tout se vend. [C’est moi qui souligne.]

Et, vous l’aurez sûrement reconnu à son «style», ce texte sur la convergence a paru le 6 mars 2003 dans l’hebdomadaire Voir sous la signature de… Richard Martineau!

February 2nd, 2009
Catégorie: Commentaires, Lectures, Réflexions Catégorie: Aucune

3 commentaires à propos de “Sur le trottoir (encore une fois)”

  1. Valérium Tremens a écrit:

    Pis? Il t’a tu demandé d’être son ami sur le Livre-de-Face, ton Ricky Martin adoré?

  2. Stanley Péan a écrit:

    Non, pas encore… Mais je ne désespère pas! 😉

  3. Fagstein » Journal Daily Digest: Martineau a hypocrite? a écrit:

    As Journal de Montréal columnist Richard Martineau whines about the hate mail he’s getting after his appearance on Tout le monde en parle Sunday night (he’s still getting plenty of blog hate too, but I’d love for someone to setup a blog solely for the purpose of making fun of me), someone dug up a column he wrote for Voir back in 2003 bashing Quebecor’s convergence and has apparently been emailing it to Richard Therrien, Steve Proulx, Rue Frontenac and others. Considering he now blogs for Canoe, writes for the Journal and has a show on LCN, it does kind of make him look like a hypocrite. []

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