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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Péan au Népal, Jour 7 – Le lait quotidien

Ce séjour ressemble quasiment une cure de désintox: le plein-air, les promenades à pied dans les montagnes, la consommation d’alcool quasiment réduite à zéro. Décidément, à quelques semaines de mon cinquantième anniversaire, je reviendrai du Népal transformé!

Levés tôt, mes collègues et moi assistons à la collecte du lait que fermiers et fermières de Chapeli et des environs viennent porter au centre de réfrigération du centre-ville. Avec un équipement de chimiste assez rudimentaire, les employés du centre notent le volume puis testent la qualité du produit avant de le transvider des bidons d’aluminium offerts par le CECI vers les containers de réfrigération. De là, nous faisons une escale pour voir en fonction l’espèce de téléphérique qui relie ce versant de la montagne à un village de l’autre côté de la vallée. C’est dans une grande nacelle ouvert, sans couverture, que certaines marchandises voyagent, suspendues au-dessus du vide, vers cette destination quasi impossible à distinguer. Avec le vent qui fait ballotter la nacelle, j’ose avancer qu’il doit parfois arriver que du lait acheminé dans des contenants par ce biais se transformera volontiers en beurre durant le voyage. Benoît Aquin, qu’on pourrait aisément rebaptiser « Taquin », nous demande à France-Isabelle et à moi, si l’un d’entre nous ne devrait pas essayer la traversée à bord de la nacelle, pour mieux évaluer ce moyen de transport pour notre rapport de mission. Inutile de dire que je préfère passer mon tour.

Nous roulons vers Gotikhel, à quelques demi-heures de Chapeli, où nous visiterons encore des fermes et un centre de réfrigération du lait, son laboratoire, et observeront les étapes de collection, de préservation et de réacheminement du précieux liquide. Au centre-ville, à l’occasion de notre passage dans un centre de traitement du lait, nous avons l’occasion de goûter à une sorte de crème épaisse excessivement sucrée, douceur extrêmement prisée par les Népalais, qui entre dans la fabrication de beaucoup de friandises locales. Il fait un temps superbe. Dans les ruelles étroites de ce bourg qui semble n’avoir pas trop souffert du séisme de l’an dernier, nous croisons des étudiants en uniforme, passons devant l’atelier d’une couturière très concentrée sur son ouvrage, un bureau de transactions bancaires internationales. C’est la bourgade la plus moderne qu’il m’a été donné de voir jusqu’ici dans l’arrière-pays népalais.

Après avoir dîner dans notre cantine mobile, le grand chapiteau dressé à côté de nos tentes sur notre nouveau site de campement, nous allons vers Chandanpur, où notre délégation est comme de raison accueillie avec les égards désormais habituels: des foulards soyeux, des colliers de fleurs et le traditionnel teeka, marque rouge traditionnelle qui nous est appliquée au milieu du front en guise de bienvenue. Dans la grande salle publique de la bourgade, nous échangeons candidement avec les représentants locaux de l’Union coopérative des producteurs laitiers du district de Lalitpur (LDMPCU). Puis, l’équipe se scinde en deux groupes qui iront chacun de leur côté chez l’habitant.

Avec la cordialité népalaise proverbiale, le couple de fermiers nous reçoit, Kiran Ambwani et moi, d’abord dans la maison qu’ils n’osent plus habiter, tant elle a été fragilisée par le tremblement de terre; fissuré de toute part, leur imposant ancien foyer sur deux étages leur sert surtout d’entrepôt pour les fruits de l’agriculture désormais. Dans l’abri en tôle d’une seule pièce où ils logent avec leurs enfants, ils nous servent un thé à base de feuilles dont ils font eux-mêmes la culture. Nous sirotons la boisson chaude et réconfortante en écoutant le récit de l’homme, dont la comparaison qu’il fait entre le tremblement de terre de l’an dernier et le précédent dont il a gardé mémoire, survenu en été 1988 alors qu’il était encore adolescent. Le séisme d’alors avait atteint 6.6 sur l’échelle de Richter, contre 7,8 pour le désastre d’avril 2015.

Ce sera bientôt l’heure de repartir vers le campement à Gotikhel, mais tout en continuant la discussion, nous assisterons pour terminer à la traite d’une bufflesse.

March 2nd, 2016
Catégorie: Commentaires, Événements, Réflexions Catégorie: Aucune

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