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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Jour 14: Je reviens chez nous

Découragé par de petits ennuis informatiques (mon portable capricieux me fait la vie dure, depuis quelques jours), j’ai opté pour le sommeil à mon retour du concert intime d’Aline de Lima, dans le caveau du Café de la Plage. Le fait que je sois rentré à pieds du XIe arrondissement, histoire de marcher dans les traces de pas imaginaires que j’ai laissées au fil des vingt dernières années sur les pavés de Paris, n’est peut-être pas étranger à mon saut précipité entre les bras de Morphée. Une heure quarante de marche, ça use son homme.

Paris by Night (1)     Paris by Night (2)     Paris by Night (3)

À l’instar d’un vrai p’tit touriste japonais, appareil de photo à la main, j’ai suivi une trajectoire plus ou moins aléatoires, multipliant les clichés nocturnes, et reconnaissant à l’occasion avec surprise des restos où je m’étais autrefois cassé la croûte avec Simon, qui étudiait autrefois en musique à Paris; un comptoir où je m’étais arrêté seul, le temps d’un court bien tassé; au loin, la tour Eiffel où j’étais allé la première fois avec mon oncle Dieter; le jardin du Luxembourg que j’avais arpenté, à six ans d’intervalle avec Marie-Josée puis avec Patsy, alors enceinte; le Procope où nous avions mangé en tête à tête, elle et moi; et, plus étonnant, tout près de mon hôtel, la Coupole où nous avions officiellement annoncé à mes amis de Québec et du Mans que nous attendions ce bébé qui deviendrait Laura.

On a beau faire, on a beau dire, il y a une certaine délectation dans la nostalgie, surtout quand on est un mélancolique de profession tel que moi. Et puis, je crois bien que battre le macadam de Paris sous la bruine intermittente, les joues imbibées de larmes ou de pluie (ah, Mario Pelchat, quand tu nous tiens…), en chantant «Tu sais, je vais t’aimer» en duo avec Henri Salvador,  «Je t’aimais bien, tu sais» en chœur avec Léo Ferré, «Indian Summer» avec Frank Sinatra et enfin «What Are You Doing the Rest of Your Life?» à l’unisson avec Sting et Chris Botti à la trompette constitue pour moi un nouveau summum dans le léchage des vieilles plaies. Vivement mon retour à Montréal, bon sang!

C’est cependant au son d’un concert de Miles au Lincoln Center en 1964 (My Funny Valentine) que j’ai traversé le VIe jusqu’à la porte du Stanislas. À l’aller, évidemment, j’avais préféré me mettre en appétit pour le concert, en écoutant quelques plages (jeu de mots!) des deux premiers albums d’Aline, Arrebol et Açaï. Le caveau où elle se produisait hier devant une quarantaine de privilégiés n’avait rien des paysages tropicaux qu’évoque volontiers la chanson brésilienne, mais cette fille a le don de nous faire rêver de son nordeste natal, même dans la sobriété d’une performance en duo guitare/clavier.

Aline de Lima (1)     Aline de Lima (2)     Aline de Lima (3)

Après le concert, nous avons pu échanger quelques mots, notamment sur notre collaboration à distance – c’est fou, mais bien que nous écrivions des chansons ensemble, chacun de son côté de la Grande Mare, nous n’en étions qu’à notre deuxième rencontre en chair et en os. Plus surprenants encore sont ces deux inconditionnels de sa musique – un Britannico-afghan et un Franco-Américain – qui suivent assidûment sa carrière et ne se connaissent l’un et l’autre que pour s’être croisés à répétition dans l’assistance. Un sujet de nouvelle, comme je le leur ai fait remarquer avant d’entreprendre ma traversée de Paris-by-night.

May 30th, 2010
Catégorie: Nouvelles Catégorie: Aucune

2 commentaires à propos de “Jour 14: Je reviens chez nous”

  1. Aline de Lima a écrit:

    L’aspect minéral du lieu n’a pas empêché les fleurs de notre amitié d’envahir mon âme. Merci d’être passé nous voir ! bisous de Paris

  2. sonia a écrit:

    Ah Paname, tout un poème….

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