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Haïti 2015 – 5: « Ayisyen pa pè bal, men li pè lapli »

J’avais presque oublié le dicton. J’ai souri en l’entendant de la bouche d’un des deux gardes de sécurité posté à l’entrée des loges, au haut de l’escalier derrière la scène Barbancourt de la Fokal, hier soir.

« Ayisyen pa pè bal, men li pè lapli. » L’Haïtien ne craint pas les balles, mais il a peur de la pluie.

Mardi soir, une défectuosité de la génératrice avait interrompu à plusieurs reprises le tour de chant de la blueswoman canadienne Bella Cat. Hier, c’est la pluie qui a mis pour ainsi dire fin aux festivités, alors que le trio du superbassiste haïtien Gérald Kébreau venait tout juste de succéder au trio du pianiste belge Igor Gehenot, que je venais juste de découvrir sur scène puis d’interviewer en coulisses. Une pluie drue, tiède, un déluge comme les Tropiques nous en réservent parfois, mais pas à cette période de l’année. C’est drôle : à mon dernier passage, aux deux dernières semaines de novembre, en pleine saison des pluies, il n’avait guère plu. Et là, au cœur de la saison sèche, cet orage modérément violent qui suffit à disperser la foule assemblée dans la cour arrière de la Fokal.

Igor Gehenot à la Fokal (pas de moi cependant)

Quelle déveine! En plus de Kébreau que j’aurais bien aimé entendre plus longuement, il y avait le réputé saxophoniste Thurgot Théodat en troisième partie du programme de la soirée que je rêvais d’écouter pour la première fois en concert.

Joël Widmaer et Milena Sandler, les éminences grises de la Fondation Haïti Jazz et de ce festival qu’elle chapeaute, affichent cette philosophie qu’on aurait tort de confondre avec du renoncement devant la fatalité. Ils en ont vu d’autres. Il leur faudrait une scène couverte, ils en ont pleinement conscience et savent surtout que les frais de location d’une telle scène dépassent leur budget pourtant respectables. Mais ils sont surtout pragmatiques et, entre deux gorgées de Barbancourt, réfléchissent à un plan B, une manière d’offrir aux artistes dont les prestations ont dû être annulées.

Le côté positif de ce petit désagrément, c’est qu’il m’a permis de faire la rencontre du pianiste français Laurent De Wilde, que j’espérais interviewer dans le cadre de mon émission. L’homme s’est révélé aussi charmant et drôle (il faut voir son imitation des « Têtes à claques » pour le croire!) que le musicien est doué. Nous avons pris rendez-vous pour le lendemain.

Mon émission prenait forme et je m’en suis réjoui…

January 22nd, 2015
Catégorie: Nouvelles Catégorie: Aucune

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