stanleypean.com


Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Autour de minuit, sur la 20

J’ai rédigé ces lignes à bord de l’autobus Québec-Montréal, à quelques minutes de mon quarante-deuxième anniversaire. J’avais du travail à terminer. J’ai préféré revoir le DVD de Jerry Seinfeld en spectacle à Broadway (I’m Telling You for the Last Time).

Beau souper bien arrosé hier soir, en compagnie d’André, Hélène, Brother Rey et les enfants. Patsy est rentrée plus tôt que prévu de sa semaine à Cuba, pour le plus grand plaisir de Laura et Philippe. La fin des vacances pour tout le monde; pendant que le petit faisait sa sieste d’après-midi, j’ai supervisé les devoirs de Laura qu’elle et moi avions remis au lendemain tout au long de notre semaine ensemble : dictée, questions d’arithmétique et tout le tralala. La fin des vacances, je vous dis.

Retour au boulot demain donc. À ma demande expresse, le secrétariat de l’UNEQ a émis vendredi un communiqué condamnant le contrat que Quebecor Medias a décidé d’imposer aux collaborateurs pigistes du journal Ici. La clause controversée porte sur la renonciation des droits d’auteur et des droits moraux sur les textes publiés par les journalistes dans les pages de l’hebdomadaire culturel. Il faut le faire : unilatérale et sans limite dans le temps, la renonciation. Tout ça pour un salaire qui fait pas d’bruit, comme chantait Ferré. Et l’impayable Luc Lavoie, l’implacable Numéro 2 de l’Empire, a eu le culot de déclarer l’autre jour avec la subtilité coutumière : «S’ils ne sont pas contents, ils ont juste à aller écrire ailleurs.»

J’ai été chroniqueur pigiste au Ici, à la première année d’existence du canard. J’ai démissionné en novembre 1998 par solidarité pour les membres de la rédaction de l’époque qui s’étaient vu servir grosso modo l’ultimatum suivant par une représentante de Quebecor Media : «Écoutez, les jeunes, vous faites le journal qu’on vous dit de faire, sinon vous fichez le camp. Mais sachez que nous détenons près du deux tiers des medias de cette province et que si nous le décidons, aucun de vous ne travaillera plus jamais dans un journal.» La dame savait manifestement de quoi elle parlait: pas un des jeunes idéalistes qui avaient pensé lui tenir tête n’a plus écrit une seule ligne dans quelque journal qui soit depuis dix ans. CQFD. Pour ma part, on m’avait proposé de rester et on m’avait même promis d’augmenter mes honoraires si je le faisais. J’ai décliné l’offre. Question de principe. Inutile de dire que les chroniqueurs de l’époque n’avaient pas tous eu cette même élégance…

C’est la manière dure de faire qui prévaut dans l’Empire, où les journalistes sont considérés comme de vulgaires tâcherons interchangeables et leurs papiers comme de la simple garniture destiné à orner les espaces vides entre deux pubs pour Star Académie, Le Banquier ou quelque autre ineptie animée par la Julie. Pour s’en convaincre, il suffit de se rappeler le lock-out au Journal de Québec qui dure depuis près d’un an.

Voilà qui est dit. Et je suis officiellement plus vieux qu’hier. Et peut-être même un peu plus sage…

March 30th, 2008
Catégorie: Commentaires, Réflexions Catégorie: Aucune

3 commentaires à propos de “Autour de minuit, sur la 20”

  1. Les_Singes a écrit:

    Joyeux anniversaire Stanley 🙂
    Avec les années on perd toujours un peu notre désillusion, mais que c’est bon!

  2. Venise a écrit:

    La sagesse ne vient pas avec l’âge mais avec l’acceptation de l’âge … Bonne fête !

  3. Stanley Péan a écrit:

    Merci infiniment, Venise.

≡ Soumettez votre commentaire