stanleypean.com


Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Après les fleurs, le pot…

Comme n’importe quel de mes collègues qui voit son travail honoré par le jury de présélection d’un prix littéraire, j’ai été bien entendu flatté par l’annonce au printemps dernier que Bizango était en lice pour le tout nouveau Prix Océans, instauré conjointement par le réseau de télévision France Ô et Babelio.com, et parrainé par nul autre que ce bon vieux Alain Mabanckou, en compétition avec des titres signés Patrick Chamoiseau (L’Empreinte à Crusoë, Gallimard), Carl de Souza (En chute libre, L’Olivier) et Scholastique Mukasonga (Notre Dame du Nil, Gallimard), pour ne nommer que ces trois collègues-là.

Après l’accueil quasi-unanimement chaleureux que s’était mérité à mon roman la presse de part et d’autre de l’Atlantique, cette mise en nomination arrivait comme la cerise sur le sundae, pour ainsi dire…

Mais après toutes les fleurs du printemps et de l’été 2011, je suppose que je devais m’attendre à recevoir le proverbial pot… Car si je me fie aux commentaires négatifs publiés par quelques membres du jury d’internautes du Prix Océans sur leur blogue personnel et repris sur le site de Babelio (quelle étrange pratique! les délibérations d’un jury ne sont-elles pas censées demeurer secrètes jusqu’à la décision finale?), mon roman jugé très sévèrement a toutes les chances de se voir éliminé au premier tour. Tenez, pour vous donner une idée…

LiliGalipette écrit: «Sexe, drogue, violence : ce roman noir est un classique du genre. Hélas, c’est presque un poncif. La touche surnaturelle apportée par les traditions vaudou haïtiennes offre heureusement un peu d’exotisme et d’imprévu. On découvre un peu la communauté haïtiano-québécoise, mais nous voyons surtout le mauvais côté et bon nombre de clichés. Si j’ai aimé retrouver les idiomes québécois et autres spécialités locales, je me suis rapidement ennuyée en lisant ce polar. Je le sais, ce genre recueille très rarement mes faveurs. Même quand j’en aborde un avec l’esprit ouvert, je suis rapidement agacée et mon intérêt s’émousse.»

Sharon ajoute: «S’il fallait qualifier cette lecture d’un mot, je dirai “plaisante”. Ce n’est pas vraiment l’adjectif que je me serai attendue à accoler au vue du quatrième de couverture. Il est vrai que je suis une grande fan de romans policiers et que peu de choses m’ont surprise dans le déroulement de cette intrigue.»

Missbouquinaix renchérit: «Pour conclure, cette histoire m’a intéressée pour son fonds, et son personnage. Après, c’est une succession d’évènements violents, de scènes sexuelles horribles, de massacres de la langue, de racisme, de machisme, etc. (…) Un véritable cocktail supposé être celui des quartiers pauvres de Montréal, mais qui m’a semblé aller trop loin, à la limite de la caricature.»

Et bina de surenchérir en ces termes: «Ce roman est donc un peu enchevêtré, lourd à lire, inconvénient dû au style de l’auteur. J’aime bien le polar, je n’ai rien contre une touche de surnaturel, à condition d’avoir une réponse à la fin, ou alors un rebondissement qui nous tient en haleine. Rien de tout cela ici. le sujet aurait mérité d’être mis en valeur différemment.»

Mais la critique la plus cinglante me vient de l’écrivaine MarianneDeroziers, que je me permets de citer intégralement:

Un livre qui m’a horripilée dès la première phrase (ça commençait bien) :

« Andréa Belviso gara sa Yaris le plus près possible du périmètre de sécurité érigé par les autorités, inspira profondément, puis coupa le contact. »

Ce roman c’est un peu un mélange de San-Antonio (pour le côté argotique et assez vulgaire des policiers qui enquêtent) et de Didier van Cauwelaert (pour le surnaturel) mais à la sauce québéco-haïtienne. Vous craignez que ce mélange soit aussi indigeste que de la poutine à la graisse de canard créole ? Vous avez tout à fait raison.

L’intrigue ne m’a absolument pas intéressée, les personnages m’ont paru faux, le style faussement décontracté ne m’a pas du tout séduite. Bref, je n’ai pas accroché du tout à ce roman de Stanley Péan, auteur d’origine haïtienne qui vit au Québec et qui a surtout écrit pour les adolescents. (Sur ce point, elle a tort: les livres pour la jeunesse sont minoritaires dans mon oeuvre, mais bon…)

Ce que je reproche surtout à ce roman c’est d’être un mauvais scénario de téléfilm et de manquer totalement de style. Il n’y a que des dialogues et des descriptions d’actions avec sujet /verbe / complément. (Vraiment…?)

Autant vous dire, que ce n’est pas un livre que je défendrai devant les autres membres du jury pour lui attribuer le Prix Océans 2012.

Wow! Que de douches froides! Et quelle belle leçon d’humilité. Mais si je suis bien conscient (et depuis longtemps) qu’un écrivain ne peut pas plaire à tout le monde, j’étais loin de me douter que mon travail pouvait déplaire à autant de monde! M’enfin, tant pis pour moi… Si cela vous intéresse, vous pouvez lire ces critiques sur les blogues respectifs des jurés (j’ai mis des hyperliens sur leur nom) ou sur cette page du site de Babelio.com concernant Bizango. Quant à moi, il ne me reste plus qu’à aller m’enfoncer la tête dans le sable ou coiffer un bonnet d’âne, je suppose…

August 17th, 2012
Catégorie: Événements, Lectures, Réflexions Catégorie: Aucune

3 commentaires à propos de “Après les fleurs, le pot…”

  1. Sebastien a écrit:

    .. et qu’en disent les hommes?

  2. Missbouquinaix a écrit:

    Bonjour,

    Je viens de lire ce billet, par le lien d’une autre juré. Je suis désolée que vous vous soyez pris une telle douche. Cependant je tiens à préciser que j’ai relevé des éléments positifs dans votre roman et que la manière dont vous avez découpé mes dires ne vous fait pas honneur. Je déteste cette manière journalistique de détourner les propos. Certes nos critiques sont globalement négatives, mais il faut déjà prendre en compte que nous les notons en concurrence avec d’autres, et en l’occurrence nous avons tous eu un coup de cœur pour un autre roman en lice. Si en effet, les critiques négatives font partie du “jeu” de la publication, il me semble que votre article est hors de propos et inutile. J’aurais préféré entamer un vrai dialogue avec vous – pourquoi pas un commentaire sur mon blog ? – plutôt qu’un tir à vue, unilatéral.

    Tout en restant cordiale,

    Missbouquinaix

  3. Stanley Péan a écrit:

    Bonjour Missbouquinaix,

    Ce billet portait sur les aspects globalement négatifs de vos critiques, alors il va de soi que ce sont eux que j’ai cités. Je ne vois cependant pas pourquoi vous vous en formalisez, d’autant plus que j’ai inclus des hyperliens qui permettent aux lecteurs de mon blogue de lire vos commentaires dans leur version intégrale, sans ce prétendu détournement de propos que vous me reprochez.

    Cela dit, à l’invitation du responsable éditorial de Babelio.com, j’ai répondu ce matin même à une série de questions émanant des membres du jury du Prix Océans, dans un esprit de vrai dialogue. Loin de moi l’envie de prendre à parti des lecteurs et des lectrices qui sont souverains et tout à fait libres de juger, de critiquer, voire de descendre en flammes mes oeuvres publiées, je vous le garantis.

    Toujours cordialement,

    Stanley Péan

≡ Soumettez votre commentaire