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Les carnets web de l'écrivain Stanley Péan

Disparition de Gérard Étienne [1936-2008]

Décidément, une funeste nouvelle n’attend pas l’autre en cette saison. À peine le milieu avait-il fait ses adieux à Hélène Pedneault qu’on apprenait hier le décès, dimanche, de l’écrivain haïtiano-montréalais Gérard Vergniaud Étienne. Romancier, poète, essayiste, journaliste et linguiste, Gérard appartenait à l’instar d’Anthony Phelps ou Émile Ollivier à cette génération d’intellectuels issu de mon île natale qui m’avaient pris sous leur aile, à mes tout débuts. Nous n’avons jamais été intimes, lui et moi, mais je crois que nous éprouvions l’un pour l’autre un grand respect réciproque, ainsi qu’en témoignaient nos échanges au comité de l’UNEQ où il siégeait et ailleurs. En ce qui me concerne, ce respect avait pour source les livres de ce disciple du grand Jacques Stephen Alexis, que m’avait fait découvrir Frantz Voltaire au cours de mes premiers étés à Montréal: d’abord, Le Nègre crucifié (son classique!), mais aussi La reine Soleil levée, Une femme muette… et tous ces romans qui suivront et qu’il m’arrivera même à l’occasion de commenter dans mes chroniques (notamment, Maître Clo ou la romance en do mineur, recensé dans les pages de La Presse). Je garde un souvenir encore plus fort d’Un ambassadeur macoute à Montréal, dont l’influence sur mon propre livre Zombi Blues me semble manifeste.

Personnage haut en couleurs, doté de ce tempérament explosif caractéristique de certains Capois (comme mon défunt père!), Gérard Étienne est entré dans l’imaginaire collectif québécois lors d’une mémorable apparition à l’émission Raison Passion qu’animait Denise Bombardier à la télévision de Radio-Canada. Ce soir-là, en 1993, ayant appris qu’Étienne s’apprêtait à fustiger en ondes le féodalisme haïtien, de fanatiques supporters montréalais d’Aristide et de la fanmi Lavalas avait attendu l’écrivain à l’entrée de la Maison de Radio-Canada et l’avaient agressé physiquement. Sous le choc, outré par le comportement de ses compatriotes, Étienne était tout de même allé en studio comme prévu et avait accordé cette inoubliable entrevue à une Mme B. qui joua à fond la carte du sensationnalisme si bien qu’on ne savait plus trop si oui ou non le liquide rouge qui dégoulinait sur le visage de l’écrivain était du sang.

[17 décembre: Ma consoeur de l’UNEQ et amie de Gérard, Jocelyne Delage, me donne un gentil coup de règle sur les doigts au sujet de cette histoire; à ce qu’elle m’écrit dans un petit mot à lire dans la section Commentaires, Gérard avait bel et bien été blessé au sang lors de cette agression. Mea culpa, mea maxima culpa.]

Je m’égare. Ce qu’il importe de dire ici, c’est qu’une voix forte et claire des littérature haïtienne et québécoise — de la littérature tout court, en somme! — s’est tue ce week-end. Et nous en sommes du coup tristes et appauvris. Encore qu’il nous reste ses livres, qui perpétueront à jamais l’écho de son indignation, de son humanisme, de sa poésie.

Gérard Étienne [1936-2008]

Salut, frère Gérard. Comme le veut une formule rituelle, j’évoque ton nom mais ne te détourne pas de ton chemin d’éternité.

Quelques références: un essai de Saint-John Kauss sur la poésie d’Étienne paru sur le site Potomitan; cette entrevue réalisée par Ghila Sroka et enfin cette notice bio-bibliographique sur le site d’Île en île,

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